1948
1948 | Les événements.
Radio-Andorre doit se taire par n'importe quel moyen.
En cette année 1948, le gouvernement français est déterminé à faire taire définitivement Radio-Andorre. Tous les moyens sont utilisés pour arriver à cet objectif, après la tentative d'étouffer financièrement la station en faisant fermer sa régie publicitaire.Le co-prince français commence à retirer à la station son autorisation d'émettre qui lui avait donné en novembre 1938. Il considère qu'elle ne sera pas renouvelée à son échéance de novembre 1948. Mais cette décision reste sans effet en raison du refus de changer quoique ce soit par le co-prince espagnol.
Deuxième mesure, on décide de brouiller les programmes de Radio-Andorre. Un émetteur de brouillage est mis en place par la RDF à Bordeaux Néac. Le brouillage empêchera l'audition de la station sur la périphérie de sa zone d'écoute, mais ne sera pas toujours d'une grande efficacité. La station ne modifie en rien ses programmes.
Troisième mesure : Les douanes françaises à la frontière andorrane reçoivent la consigne de saisir les disques des émissions sponsorisées envoyées depuis Paris en Andorre. Cette mesure aura comme conséquence d'entamer la confiance des annonceurs et sponsors de ces émissions dont la diffusion n'est plus assurée avec fiabilité. Radio-Andorre est contrainte de faire transiter ses disques via Genève puis l'Espagne pour qu'ils arrivent en Andorre.
Des pressions diverses sont également menées par le Viguier français auprès de certains Conseillers du Conseil Général pour qu'ils nationalisent Radio-Andorre.
Les actions en justice se poursuivent à l'encontre de Jacques Trémoulet, mais là aussi, le procès commence à tourner en sa faveur puisqu'un supplément d'information est demandé.
Enfin, une tentative d'enlèvement du Directeur de la station, Étienne Laffont est organisée par les forces françaises en Andorre. Un capitaine, un lieutenant et un adjudant de la gendarmerie française se présentent à la station à bord d'une traction avant et tentent d'emmener Étienne Laffont. Mais ce dernier, qui avait déjà connu cette aventure avec la Gestapo durant la guerre, a réussi à déjouer ce plan. Le Viguier de France en Andorre devra transmettre les excuses de son gouvernement au co-prince épiscopal pour cet incident diplomatique.
Parution dans la revue Science et Vie.
Chronologie - 1948
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10 avril 1948 :
Le co-prince français retire à Radio Andorre son autorisation d'émettre.
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22 avril 1948 :
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27 avril 1948 :
Le Viguier de France en Andorre avise officiellement Mme Dolorès Vila y Puiggros que le Président de la République retire l'autorisation d'émettre précaire et révocable de 1938.
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2 mai 1948 :
Début du brouillage de Radio Andorre. C'est l'émetteur de la RDF de Bordeaux-Néac (20 kW) qui est chargé de brouiller l'onde moyenne (426 mètres) de Radio Andorre. L'onde Courte est brouillée également mais apparemment depuis un émetteur situé au centre de la France.
13 mai 1948 :
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9 juin 1948 :
Le Syndicat Autonome de la radiodiffusion Française marque sa désapprobation face à ce brouillage qu'il juge indigne de la République et de la démocratie.
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5 juillet 1948 :
Le gouvernement français décide de fermer la frontière aux disques, aux programmes et au matériel radiophonique destiné à Radio Andorre. Le personnel de la station n'a également plus le droit de passer la frontière.
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7 septembre 1948 :
Les Parlementaires français s'élèvent contre le brouillage de Radio Andorre.
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30 septembre 1948 :
Le brouillage s'interrompt.
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26 novembre 1948 :
Le brouillage reprend.
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21 décembre 1948 :
Radio-Andorre assigne M. Wladimir Porché, Directeur Général de la RDF, pour brouillage illégal devant la 17ème Chambre Correctionnelle. Elle réclame 20 millions de dommages et intérêts à la RDF.
Campagne de publicité parue dans la presse espagnole en 1948. La campagne insiste essentiellement sur le patrimoine technique de la station avec des photos de l'émetteur, du bâtiment du Roc des Anelletes. On voit également le technicien Paul Cousse aux manettes de l'émetteur SFR.
1948 | Les Programmes.
Les émissions achetées à des sociétés de production.
Devant le succès rencontré par les émissions achetées aux sociétés de production de Radio Luxembourg, Radio Andorre décide de multiplier ce genre d'émissions.
Début 48, elle diffuse :
- "Y'a d'la gaieté dans ma maison" présenté par Georges Gosset.
- "La Chanson de mes auditrices" par le chanteur de charme André Claveau
- "Le Pêle-Mêle" de Jean-Jacques Vital
- "Ça ne vous rappelle rien ?" animé par Robert Beauvais avec l'orchestre de Paul Durand
- "Qui est la vedette ?" par René Marc
- "Où chantons-nous ce soir ?"
- " Musique sans paroles" avec Claude Normand au clavioline
- " Tiré par les cheveux" de Robert BeauvaisA partir de la rentrée 48, d'autres émissions de Radio Luxembourg complètent la grille de programme :
- "Hier contre Aujourd'hui",
- "Le tire-bouchon", avec Roméo Carlès
- "Le Grand Prix du Disque de la Radio", de Pierre Hiegel : Cette émission consacrée à la musique classique propose les meilleurs enregistrements avant le Grand Prix du Disque officiel de l'année.
- "Le Grand Prix des Quatre Saisons", de Jean Nohain
- "Le Magazine de Jean Nohain"
- "Les Incollables", avec Henri Kubnick : Cette émission déjà présentée avant-guerre sur le Poste Parisien par le même Henri Kubnick, alors lycéen, est l'ancêtre de l'émission "Les Grosses Têtes". Il s'agit d'envoyer des questions à une petite assemblée de comédiens, humoristes et chansonniers. Robert Beauvais, Gilbert Cesbron, Claude Dauphin (le Président) sont les invités réguliers de l'émission.
La seule difficulté de la station est de pouvoir acheminer les bandes de ces émissions en Andorre, ce qui n'est pas facile notamment lorsque l'accès de l'Andorre est impossible en raison de la neige ou... du "zèle" des douaniers français. Concernant les routes coupées par la neige, ce sont des skieurs qui transportent le courrier en Andorre. Concernant le zèle des douaniers, c'est le bon vouloir des autorités françaises et du degré de tension avec Radio-Andorre qui déterminent le blocage ou non du courrier.
Les autres émissions de Radio-Andorre.
L'immuable "Concert des auditeurs" qui a succédé à la "1/2 heure des auditeurs" continue à agrémenter le programme des soirées de la station en créant ainsi un lien avec ses auditeurs qui lui envoient toujours sur carte postale les disques qu'ils veulent entendre. Pour le reste, pas de changement, toujours de la musique, rien que de la musique. De toute façon la station n'a pas les moyens d'élaborer des émissions à l'image de celles qu'elle achète aux sociétés de production. Le problème est moins financier que technique : L' Andorre n'est pas aussi fréquentée par les artistes que Paris ou même les grandes villes françaises et il est très difficile de réunir deux chanteurs autour d'un micro dans la principauté. Aussi Radio-Andorre consacre-t-elle beaucoup d'argent à l'entretien de sa discothèque qui est une des plus importante d'Europe.
mercredi 19 mai 1948 | Grille de programmes
◼︎ 19h00 : Jazz
◼︎ 19h25 : Le disque des auditeurs
◼︎ 19h30 : Y'a d'la gaieté dans la Maison - avec Georges Gosset*
◼︎ 19h45 : La chanson de mes auditrice - avec André Claveau*
◼︎ 20h00 : La chanson du jour
◼︎ 20h05 : Qui est la vedette ? par René Marc*
◼︎ 20h25 : Music-Hall ◼︎ 20h27 : L'Ange du Foyer ◼︎ 21h05 : Chansons françaises nouvelles ◼︎ 22h00 : Les Nouveautés du Jazz ◼︎ 22h25 : Concert des auditeurs ◼︎ 23h10 : Musique d'opérettes ◼︎ 23h20 : Soli d'orgue de cinéma ◼︎ 23h30 : Refrains par Johnny Mercier ◼︎ 23h40 : Musique d'opérettes espagnoles ◼︎ 23h50 : Bal Musette ◼︎ 24h00 : Musiques de films ◼︎ 00h10 : Musiques variées ◼︎ 00h50 : Fin des émissions
* ◼︎ Émissions produites par des sociétés extérieures
jeudi 23 décembre 1948 | Grille de programmes
◼︎ 15h00 : Arrêt des émissions du matin
◼︎ 19h00 : Nouveautés ◼︎ 19h20 : Musiques de films ◼︎ 19h30 : Orchestre Bachicha ◼︎ 19h40 : Sardanes ◼︎ 20h00 : Jazz
◼︎ 20h15 : Le Tire Bouchon - Variétés avec Roméo Carlès, Yves Deniaud...
◼︎ 21h00 :Pêle-Mêle : par Jean-Jacques Vital, avec Bourvil, Monsieur Champagne, J. Delettre et l'orchestre de Jacques Hélian.
◼︎ 21h40 : Orchestre Musette : Émile Prud'homme ◼︎ 22h00 : Jazz ◼︎ 20h25 : Concert des auditeurs ◼︎ 23h00 : Émission variée ◼︎ 23h45 : Danses ◼︎ 24h00 : Opérette espagnole de Franz Léhar ◼︎ 00h10 : Disques variés ◼︎ 01h00 : Fin des émissions
* ◼︎ Émissions produites par des sociétés extérieures
1948 | Équipe
De nombreux nouveaux venus en cette année 1948
Debout : Teresa Solano-Castillo et Guy Picart.
Du côté des speakers espagnols, les émissions sont présentées par Gerardo Esteban.
La parité étant respectée à la station bien avant que cela rentre dans les mœurs, trois speakerines sont également présentes à l'antenne : Montserrat Rodriguez, Teresa Solano-Castillo et Maria Dolores Orobitg, toutes trois de langue espagnole et anciennes employée de la centrale téléphonique de Seu d'Urgell. Être opératrice de téléphone prédisposait à avoir une voix radiophonique. Montserrat Rodriguez fut celle qui connut la plus longue carrière à Radio-Andorre puisqu'elle restera à la station durant plus de 30 ans mais à différents postes. Jusqu'au début des années 60 elle présentait les émissions en espagnol. Maria Dolores Orobitg fut également speakerine de langue espagnole à cette époque. Quant à Teresa Solano-Castillo, elle épousa Guy Picart en 1952 et ils quittèrent tous les deux la station à cette date.
Dans les années 40, la station commence à diffuser la nuit sur Ondes Courtes des émissions en langue anglaise à destination de l'Angleterre et des pays anglo-saxons. Elle embauche un speaker pour assurer ce programme plusieurs fois par semaine : Alain Becbeder.
Du côté de la cabine des opérateurs du son, de nouveaux arrivants également : Amadeo Rossel Pujal, qui fut l'un des opérateurs du son durant la guerre, change de fonction et devient responsable de la discothèque et donc aussi de la programmation musicale de la station, poste important pour une station musicale. Il est remplacé à son poste en 1948 par Josep Mas Pons, âgé d'à peine plus de vingt ans. Josep Mas Pons est le fils de Josep Mas Palmitjavila, ancien responsable des travaux de l'émetteur et toujours responsable de la surveillance de l'émetteur d'Encamp. Josep Mas Pons restera attaché à la station durant 20 ans puis entamera une brillante carrière politique en Andorre. A ses côtés est embauché un autre jeune technicien du son, Agusti Pifarré qui sera fidèle à la station jusqu'en 1970. Autre figure de cette époque, le technicien Paul Cousse est employé à l'émetteur d'Encamp sous la Direction de Lucien Killmayer, ingénieur en chef. Comme Lucien Killmayer, Paul Cousse est entré à la station à ses débuts et le restera jusqu'à la fin alors que Lucien Killmayer partira à la retraite en 1974. Paul Cousse, que ces collègues appelaient affectueusement "papa Cousse" est une des rares figures de Radio-Andorre à avoir connu la totalité des directeurs et personnels de la station des années 40 à 80 mais il ne sortait jamais de l'émetteur d'Encamp et n'a pratiquement jamais mis les pieds dans les studios du Roc des Anelletes.
C'est cette petite équipe réduite qui va être chargée de relancer la station au lendemain de la guerre en jouant la carte de la convivialité, de la proximité, de la complicité. Les résultats seront largement à la hauteur car c'est une des périodes où Radio-Andorre sera une des principales stations de langue française, sans négliger son auditoire espagnol qui restait plus marginal mais néanmoins indispensable.
Organigramme - 1948
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Administrateur :
Stanislas Puiggros.
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Propriétaire :
Jacques Trémoulet
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Directeur :
Maurice Perrot
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Speakers / animateurs
M. Levrat
Teresa Solano-Castillo
Maria Dolores Orobtitg
Montserrat Rodriguez
Gerardo Esteban
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Maintenance émetteur :
Paul Cousse
Josep Mas Palmitjavila
Paul Cousse
Firmy Malleu
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Techniciens, opérateurs du son :
Techniciens, opérateurs du son :
Josep Mas Pons
Agusti Pifarré
Victoria Segalàs i Fité
Daniel Martinet
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Responsable discothèque :
Amadeo Rossel Pujal
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Responsable de la publicité :
Esther Montanya
1948 | Informations techniques
Identification
Logo :
Indicatif :
"Ici Radio Andorre - Aqui Radio-Andorra"
Slogans :
"Entrain, rythme, détente"
"Puissance, popularité, rendement"
Fréquences
Ondes moyennes :
426 m- 704 kc
60 kw
Ondes courtes :
50,16 m - 5980 kc
25 kw
Émetteur :
SFR
Puissance : 60 kw
Adresses
Studio :
Roc des Anelletes
Andorre-la-Vieille
Principauté d'Andorre
Émetteur :
Encamp
Principauté d'Andorre
Régie publicitaire
Pour la France :
10 rue Clément Marot - Paris
Pour l'Espagne :
Radinform
Plaza de Cataluña 9
Barcelona
1948 | Documents
Articles de presse.
Bibliothèque cantonale et universitaire de Lausanne.
1948 | Sources.
Sources
bibliographiques
- FRANK TÉNOT - Radios Privées Radios Pirates - Ed Denoël 1977
- RENÉ DUVAL - Histoire de la Radio en France - Ed Alain Moreau 1980
- CHRISTIAN
BROCHAND - Histoire Générale de la Radio et de la Télévision en France Tome 2 1944-1974 - CHR La Documentation Française - 1994
- EUGENIO GIRAL QUINTANA - La radiodifusión en Andorra. Política, economía y espacio comunicacional en un país dependiente - Université de Barcelone - 1988
- NOGUERES (DE) LOUIS - La radio aux frontières et la Misssion de l'Etat, Cavannes, Paris 1953
- BANNEL MICHEL - A propos de Radio-Andorre, Réponse à Louis Noguères - Paris février 1953
- JOURNAL
LE MONDE : 21 décembre 1948
Crédits photographiques
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Publicité parue dans Science et Vie : - Collection privée Jean-Marc Printz
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Publicité parue dans "la Semana" 1948 - Espagne : - Collection privée Jean-Marc Printz
- Publicité parue dans La Semaine Radiophonique, oct 1948 : - Collection privée de Jean-Marc Printz
- Photo
Fondation Valenti Claverol - Archives personnelles de Guy Picart
Témoignages
- GEORGES
MALTOT : Entretiens et échanges épistolaires depuis 1991.
- JOSEP
MAS PONS : Échanges épistolaires depuis 2008
- GUY
PICART : Interview par Jean-Marc Printz, dimanche 14 mars 2008 et échanges épistolaires en 2008
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